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S’il est un endroit où le yoga prend toute sa dimension, c’est bien lorsqu’il est pratiqué en prison. Il y souffre pourtant au départ de nombreux a priori. Comme à l’extérieur, le yoga apparait souvent de prime abord aux yeux des détenus comme une activité exclusivement féminine. Or, si dans les prisons où des ateliers yoga sont proposés, il attire en premier lieu des personnes incarcérées qui saisissent d’abord l’opportunité de sortir de leur cellule, les témoignages affluent pour dire qu’on finit par se bousculer pour participer aux cours de yoga, jusqu’à constituer des listes d’attente.

Pourquoi le yoga en prison

La prison est un lieu de souffrance, d’abord parce qu’elle accueille en son sein des accidentés de la vie qui ont trouvé refuge dans la voie de la délinquance, ensuite parce que les détenus souffrent d’une image presqu’exclusivement négative de la population générale relativement indifférente aux conditions d’incarcération souvent délétères et ne laissant que peu de chance au plus grand nombre de trouver durablement la voie de la réinsertion.

Surpopulation chronique, vétusté, insalubrité, hygiène défaillante, absence d’intimité générant violences et tensions, carences d’activités caractérisent les prisons françaises.

Qu’il s’agisse de la cour européenne des droits de l’homme, ou de la justice française elle-même, les prisons françaises sont régulièrement condamnées. Il ne s’agit pas de faire de l’angélisme, un dispositif carcéral est nécessaire pour protéger la population contre les délinquants et notamment les plus dangereux. Mais elle n’a de sens que dès lors qu’à leur sortie, les détenus soient parvenus, du moins le plus grand nombre, à trouver place dans la société et à tirer les enseignements de cet enfermement, sinon la peine de prison est vouée d’avance à l’échec.

C’est un fait avéré, l’emprisonnement augmente les risques de récidive, et constitue même un facteur d’aggravation de la délinquance. Les délinquants se fréquentent entre eux et se confortent dans leur « identité de délinquants ». Beaucoup nourissent un ressentiment envers les institutions, peinent à trouver du travail, connaissent des difficultés sur le plan conjugal et familial. Les ingrédients de la récidive sont ainsi réunis. Elle est elle-même relayée par les médias, exploitée par une partie de la classe politique au moindre fait divers l’impliquant et fige une opinion publique sur l’idée que nous ne sommes pas assez sévères avec les détenus ou que notre justice est laxiste.

Les initiatives d’introduction du yoga dans les prisons vont à l’encontre de cette tendance et trouvent une résonnance particulière dans ce contexte. Derrière toute cette violence, il y a toujours de la colère, des failles profondes. On ne devient pas délinquant par hasard, et la prévalence de populations d’origine sociale défavorisée dans la population carcérale n’est pas le fruit du hasard, ni même celui d’un « héritage génétique ». Sans céder au discours victimaire, force est de constater que si certains individus sont capables de faire preuve de résilience, beaucoup, en mal être sur les plans psychologique et social basculent dans la violence, les addictions et la délinquance.

Le yoga, une réponse à la souffrance carcérale

Cette « souffrance » ne s’éteint pas en prison, et c’est sans doute là que le yoga peut jouer un rôle primordial. Le SPIP (Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation) qui travaille à la réinsertion des détenus, encourage de plus en plus sa pratique. Une pratique de plus en plus répandue dans le monde, aux USA, au Canada, en Angleterre, en Urugay, en Suède, en Argentine, en Inde, en Papouasie Nouvelle Guinée, comme en France.

« Prison Yoga and Méditation », « Yoga behind bars », « SIS Yoga », « The Prison Phoenix Trust », les associations ou projets militant pour l’introduction du yoga dans les prisons se multiplient un peu partout dans le monde avec des résultats très positifs.

En France l’association YEP (yoga en prison) et le programme Smart sont à la pointe des programmes d’introduction du yoga comme activité en prison notamment à la maison d’arrêt des hommes de Fresnes, à Fleury Merogis ou au Centre National d’Évaluation du Réau, maison d’arrêt de Grenoble-Varces.

Les conditions de détention sont souvent synonymes d’espace de vie réduit, de perte d’estime de soi, de difficulté de communication avec autrui. La détention favorise un stress important engendrant des symptômes nombreux : angoisses, eczéma, crampes, diabète, cancer, rhumatismes, tumeurs, kystes, insomnies, infections… Les détenus développent des maladies physiques et psychiques réduisant pour nombre d’entre eux les chances d’une réinsertion, le chantier de la reconstruction devenant colossal.

Yoga et méditation, une liberté retrouvée

Or, à l’issue des séances de yoga, les détenus déclarent mieux dormir et être moins angoissés, se sentir mieux physiquement et voient s’améliorer leur relation avec les autres et notamment avec le personnel pénitentiaire. On observe notamment une baisse de l’agressivité car par les mécanismes cognitifs engendrés par la pratique du yoga, les détenus rentrent dans un contrôle de leurs émotions et cela favorise une stabilité du comportement et un meilleur niveau d’attention. La part de la méditation dans ses séances de yoga -Paris est d’ailleurs primordiale, et elle s’accompagne d’ailleurs souvent dans les témoignages d’un sentiment de liberté retrouvée.

Cette expérience de l’introduction de la méditation en milieu carcéral a d’ailleurs une expérience fondatrice, un programme initié par Kiran Bedi dans la prison de Tihar à New Dehli en 1998 et dont l’expérience a été filmée par Eilona Ariel & Ayelet Menahemi. Un documentaire assez impressionnant et qui questionne les capacités résilientes de la méditation.

Dans un lieu restreint où les temps de « promenade » sont limités, le corps est violenté et maintenir une bonne hygiène de vie est souvent compliqué. Beaucoup de détenus pratiquent le sport intensivement, notamment de la musculation, voire des pompes en cellule. Les conduites addictives sont aussi nombreuses en prison, il serait illusoire que la drogue n’y circule pas. Une raison supplémentaire de faire du yoga-Paris. Là encore, lorsqu’on parcourt les blogs ou les sites spécialisés sur la pratique du yoga en milieu carcéral, ou les vidéos proposées sur le sujet, on constate qu’elle entraine chez de nombreux détenus, des modifications positives sur le plan de leur perception du corps.

Le lien de confiance entre les détenus et les intervenants, y compris lorsque ce sont des femmes qui interviennent auprès d’un public masculin, semble toujours au rendez-vous. Les ateliers semblent très bien accueillis et malgré certains a priori au départ, beaucoup finissent par se « battre » pour intégrer ces programmes. En Argentine, dans la 48e unité pénitentiaire de la prison d’état de San Martín, à Buenos Aires, des professeurs de yoga rendent visite aux détenus de la prison de San Martin pour des cours hebdomadaires. Avec ce projet, appelé « Moksha, yoga en prison », ils rétablissent l’harmonie et permettent aux prisonniers de gérer leur stress. Dans un reportage du Figaro (Quand le yoga transforme la prison- Juin 2018) , on peut même lire des témoignages de détenus désireux de devenir eux-mêmes professeurs de yoga à leur sortie de prison. On constate aussi que certains détenus parmi les plus aguerris, intègrent par la suite le yoga dans leur quotidien.

Toutes les expériences menées partout dans le monde semblent tendre vers le même constat : le yoga enseigne aux détenus des choses fondamentales. Ils reprennent contrôle de leur souffle et donc de leur respiration, entretiennent avec les autres, en particulier le personnel, un rapport plus apaisé. Et cela parce qu’ils entretiennent un meilleur rapport avec eux-mêmes, ils retrouvent l’estime de soi, développent des états de pleine conscience rendant plus acceptable la privation de liberté physique, ouvrant

peut-être le champ des possibles en termes de réinsertion.

Le yoga en prison devrait probablement continuer de se développer même si son introduction provient encore beaucoup de l’initiative d’associations et de bénévoles qui portent un regard souvent minoritaire sur le public des détenus.

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